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Avant le célèbre fondateur des Écoles vétérinaires en France, on comprenait encore bien moins la beauté du cheval que lui ; ses devanciers, qui n’avaient pas d’assez vastes notions d’anatomie et de physiologie animales, considéraient comme beaux les chevaux possédant des formes plus ou moins arbitrairement attribuées à la belle conformation, aussi acceptaient-ils comme beau chez un cheval tout ce qui plaisait simplement à l’œil, et par conséquent, il leur fallait toujours des formes arrondies et harmonieuses. On a même été jusqu’à faire suivre au cheval les caprices de la mode, exemple : la recherche du chanfrein busqué sous Louis XV. Grâce à la Dubarry, cette forme était devenue une qualité à laquelle la science a de nos jours rendu justice, en démontrant qu’une tête ainsi constituée est plus grosse et plus lourde qu’elle ne devrait être, et que le passage de l’air qui se rend au poumon est diminué, les cavités nasales étant rétrécies par cette conformation vicieuse de la tête ; il est, en effet, facile de s’apercevoir que la proéminence antérieure du chanfrein n’est dans ce cas produite que par l’aplatissement d’un côté à l’autre de cette même région, et que ce qui est gagné en avant par les cavités nasales, ne compense pas ce qu’elles perdent en largeur. Non-seulement cette forme était un défaut, mais encore où était sa grâce ? Ne donne-t-elle pas un air ridicule et stupide, plutôt qu’agréable, aux animaux qui la possèdent ? Mais la célèbre courtisane avait un grand nombre d’adulateurs tous jaloux de l’imiter, pour chercher à lui plaire ou pour flatter servilement son détestable orgueil.

Il n’est pas étonnant que, soumise à de telles influences, la science hippique soit restée stationnaire et stérile pendant des siècles entiers ; ce n’est que depuis qu’on possède une connaissance à peu près parfaite de la mécanique animale qu’elle a commencé à faire de véritables progrès.