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Louis XVIII

liant, pieux et tolérant, grave et doux, franc et fin, majestueux et sans faste, sagement économe et royalement libéral, doué d’un sens exquis, étranger aux vengeances, inaccessible aux préjugés, protecteur éclairé des sciences et des arts, fier dans l’adversité, modéré dans la fortune, ami tendre et prodigue, prince conscient de la grandeur providentielle de sa race et de sa patrie, roi dans la vie, roi dans la mort, Bourbon, c’est-à-dire Français toujours, Louis XVIII fit monter sur le trône cet homme juste et persévérant, justum et tenacem, qu’avait glorifié son poète de prédilection. C’est à ce rare mélange d’intelligence, de sagacité, de dignité, de droiture et d’adresse, d’énergie et de douceur, que le frère de XVI dut principalement le triomphe de la cause qu’il personnifiait, et la France ces dix années d’un règne réparateur, interrompu trop tôt par la mort.

Qui ne sait avec quelle fierté souveraine, avec quelle résignation mâle, le chef de la maison de Bourbon porta le poids d’un exil dont les misères et les calamités semblaient ne devoir finir qu’avec sa vie ? Jamais ce fils de France ne perdit le souvenir de la prééminence de son berceau ; à Vérone comme à Mittau, à Hartwell comme à Gand, partout il fut le roi ; jamais son infortune ne lui arracha la plus faible concession, tant il se sentait non-seulement la tête de la plus vieille des dynasties, mais encore l’incarnation d’un dogme politique et national ; sa hauteur, au contraire, croissait en raison de son abaissement ; mais cette légitime fierté n’excluait