Et n’importe à quel point aboutira ta course,
Toujours un abîme est au bout.
Mais puisque de tes coups l’homme se glorifie,
Génie ! en avant donc, et je me sacrifie
Aux lois des destins ennemis :
Afin que je sois grand, que tu m’immortalises,
Que mon nom me survive, et que tu réalises
Tous les biens que tu m’as promis !
Et, nouveau Mazeppa, sur la fatale croupe
Déjà nous franchissions les mers. L’humide troupe
Des vagues regardait notre rapide groupe
Dépasser l’horizon.
Et leur blanche toison
S’agitait pour nous suivre. Et bien loin, en arrière,
Nous les laissions toujours, dans l’immense carrière
Où nos pas soulevaient en guise de poussière,
L’écume de leurs fronts.
Leurs nombreux escadrons
Ne semblèrent bientôt qu’une large surface :
Et nous disparaissions dans les champs de l’espace,
Pareils à la vapeur qui dans les cieux s’efface.
Des colosses ailés
Sur les flots dentelés
Passaient auprès de nous, comme de hauts fantômes ;
Puis, dans L’éloignement, on eût dit des atomes ;