Page:Ponson du Terrail - Le Bal des victimes.djvu/101

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— Dam ! n’est-ce point là ce que me disait la lettre dans laquelle tu m’annonçais ton arrivée ?

— Oui, mais j’avais un autre but…

— Et… ce but ?

— Je vais te le dire : il y a quinze jours, le directeur Barras m’a fait appeler : Bernier, m’a-t-il dit, je vous sais actif, hardi, prudent et d’une rare sagacité. Je vais vous fournir l’occasion de changer le grain de vos épaulettes. Je vous donne une mission secrète.

Un moment, je te l’avoue, j’ai cru que le directeur allait m’envoyer en Autriche ou en Russie. Point.

« Voici trois mois a-t-il continué, que la France est désolée par un étrange fléau, — l’incendie !

« Il s’est organisé partout des bandes d’incendiaires qui brûlent les récoltes, les fermes, les maisons. Ma police perd son latin ; les gendarmeries départementales déploient en pure perte leur activité. Je veux pourtant que cet état de choses cesse au plus vite.

« Je viens de choisir une centaine d’officiers jeunes, intelligents, et ne reculant devant rien. J’en fais mes commissaires dans les départements. Vous je vous envoie dans l’Yonne. Allez, observez, étudiez, prenez vos renseignements, ne brusquez rien… Mais anéantissez-moi les incendiaires. »

Barras m’a fait remettre le soir même des instructions secrètes et détaillées, et des pleins pouvoirs qui mettront, à ma première réquisition, toutes les autorités civiles et militaires du département sous mes ordres…

Maintenant, mon cher, que te voilà averti, sois muet.