Page:Pontmartin - Nouveaux Samedis, 19e série, 1880.djvu/245

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à la mémoire de Mgr Miollis, que j’ai été, pendant quinze ans, son secrétaire, le confident de ses merveilleuses charités, le compagnon de ses visites pastorales à travers nos pauvres montagnes, et que le saint évêque daignait m’appeler son ami… son jeune ami… Il a pensé — et je l’en remercie du fond du cœur — que je serais vivement intéressé par ces premiers chapitres, et que nul peut-être ne pouvait mieux que moi démêler ce qu’il y a de vrai et de faux, de vraisemblable et de chimérique dans le récit du poète…

— Eh bien ?

— J’ai parcouru ce matin le premier volume… il y a de très belles pages : mais l’exagération a tout gâté… D’abord, je ne vous ferai pas l’injure de contredire devant vous la scène absurde, odieuse, menteuse, extravagante, abominable, où mon évêque s’humilie et s’agenouille aux pieds d’un conventionnel régicide. C’est un cauchemar d’halluciné, ou plutôt c’est le détestable calcul d’un quêteur de popularité, qui veut se faire pardonner par son nouveau public d’avoir pris un moment pour son héros un évêque catholique, apostolique et romain… Quant à son Jean Valjean…

En ce moment, la servante entra pour desservir le café. Le chanoine se tut, et je crus remarquer qu’il y avait une intention dans son silence. Elle sortit ; il reprit :

— Quant à Jean Valjean… Voulez-vous l’histoire vraie ?