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Page:Pontmartin - Nouvelles semaines littéraires, 1865.djvu/270

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CAUSERIES LITTÉRAIRES.

intime et plus féconde entre le poète et toutes ces âmes qui lui demandent d’être leur interprète et leur guide ? Choisissons par exemple M. Leconte de Liste, un des maîtres de cette poésie savante de l’isolement volontaire : pourquoi tant d’efforts, pourrions-nous dire, une volonté si énergique, un contour si ferme, un ton si vigoureux, tant de muscles, de nerf et de saillie, pour aboutir à être apprécié de quelques artistes, de quelques dilettantes, et rester sans influence sur la vie intellectuelle de son temps ? Le poète est-il donc fait pour une gloire cellulaire ? Il se plaint de l’abandon de la poésie, et nous avons tenté d’en indiquer les causes ; mais de quel droit se plaindre si les mieux doués et les plus forts, au lieu de s’éclairer de notre soleil, de vivre de notre vie, de laisser battre leur cœur à l’unisson des nôtres, de donner une voix à l’âme universelle, s’exilent loin de nous, au delà des âges et des espaces, rejettent les clartés spiritualistes pour des théogonies confuses, et vont s’enfoncer dans quelque temple indieu, s’égarer dans les jungles sous le feu d’un soleil implacable, ou errer comme des fantômes sur des plages désolées ? Vous êtes poète ; ce serait une raison de plus pour être homme, car le poète, encore une fois, c’est l’humanité qui chante, c’est l’imagination de tous exprimée et notée par un seul, et voilà que, renonçant à votre plus précieux privilège, vous aimez mieux faire du poète un être exceptionnel, vivant au milieu de créatures fantasques et redoutables où je ne reconnais rien de ce que je sens, de ce que je vois, de ce que j’aime ! Quelles sont, après tout et en dépit de tous les systèmes, les vraies sources de la poésie ? C’est Dieu, c’est la nature, c’est l’amour, c’est le