Aller au contenu

Page:Pottier - Douris et les Peintres de vases grecs, Laurens.djvu/126

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
120
DOURIS.

du Louvre qui lui est attribuée (fig. 24), l’Aphrodite au Cygne (fig. 7) d’un artiste un peu plus récent, souffrent la comparaison avec les plus belles esquisses de la Renaissance. Jamais la beauté du corps humain en action n’a été rendue avec plus de joie sincère. Là encore les Grecs ont préparé la voie aux modernes, en enseignant la dignité de l’homme, en le montrant plus important et plus nécessaire à l’art que tout autre élément. Ce n’est plus la nature qui domine et écrase de sa masse l’humanité ignorante d’elle-même. C’est au contraire la pensée humaine qui se projette sur le monde extérieur et qui en prend possession.

Voilà pourquoi nous admirons l’antiquité et pourquoi un dessin de Douris nous dit beaucoup de choses. Sans doute Douris n’y est pour rien. Il ne s’en doutait pas ; il ne l’a pas fait exprès. Il a été l’instrument inconscient d’un grand peuple et d’une grande révolution. C’est ce qu’il y a d’admirable dans les œuvres du passé. Le temps seul fait voir ce qu’elles contenaient de beau et de fécond, même à l’insu de leurs auteurs. La force créatrice qui les anime est en dehors de l’individu ; elle jaillit du plus profond de la race qui les a produites. Le sculpteur qui a modelé la Vénus de Milo ne pouvait pas prévoir à quelle fortune serait appelée l’image qu’il exécutait après beaucoup d’autres effigies similaires. Léonard de Vinci serait bien surpris de ce que nous avons trouvé dans sa Joconde. « Chaque génération, dit Anatole France, imagine à nouveau les chefs-d’œuvre antiques et leur communique de la sorte une immortalité mouvante. » Ce n’est pas que nous