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L’APPEL DE LA TERRE

de caresses au rivage ; par bonds brusques elle s’écrase lourdement sur le sable assombri jusqu’au pied de la dune qui lui oppose une barrière. Plus loin, la mer est verte ; çà et là, au large, des crêtes écument sur des récifs, plus particulièrement près de l’Île Rouge, autour des Îlets-aux-Morts et à l’extrémité des terres plates de l’Île-aux-Lièvres ; sur les rochers de la Pointe-Saint-Mathieu, la mer déferle avec rage. Au contraire, plus à droite, où la vue plonge dans l’entrée du Saguenay, le flot est noir à force d’être tranquille ; il vient mourir au fond d’une anse de sable fin, d’un ovale parfait, aux lignes d’autant plus douces que la falaise qui l’entoure semble taillée à coups d’une hache gigantesque.

Aujourd’hui, répétons-le, cet ensemble charmant composé par le temps et le hasard n’a pas été complètement soustrait à l’action du tourisme et du progrès, l’un étant venu y apporter ses restaurations outrageantes et l’autre son modernisme. Mais tous deux semblent avoir montré de la bonne volonté à sauver ça et là quelques vestiges du passé. Si le luxe moderne a détruit la poésie des grèves de Tadoussac par la construction d’un hôtel très laid de style, l’amour du bibelot, ou si l’on veut, le Démon du Musée qui possède les touristes, a forcé les Vandales de la Nature à conserver intacte la vieille petite « chapelle des Sauvages », vénérable relique du passé, monument autrement plus précieux que tous les “Tadoussac’s Hostels du monde, et qui conserve dans son petit