Page:Potvin - L'appel de la terre, 1919.djvu/61

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restèrent fixés sur le petit sentier. Blanche, la première, s’enhardit ; pendant une minute, elle promena lentement ses grands yeux sur le jeune homme. Elle regardait ses cheveux d’un beau châtain qui débordaient sous son chapeau de paille rejeté en arrière, sa fine moustache également brune ; elle admirait son front haut et bombé, l’épaisse ligne de ses sourcils, son mâle visage de fils des campagnes et de la mer. Puis, elle se décida à parler.

« J’ai pensé à vous, depuis quelques jours, monsieur, » murmura-t-elle, d’une voix qui tremblait un peu. « C’est moi qui ai engagé mon père à venir vous donner le bonjour.

— Moi aussi, mademoiselle, j’ai bien pensé à vous, répondit Paul, qui regardait à présent résolument la jeune fille.

Tous deux baissèrent la tête, un instant, sans parler davantage. Sous son corsage, Blanche sentait battre son cœur à coups précipités… Elle n’avait jamais ressenti cette émotion. Comme il était beau, ce rêveur inconnu que les hasards de la vie avaient subitement placé sur sa route. Ce devait être un vaillant, celui-là, un cœur d’élite, à l’amour solide comme les rochers de la falaise…

Mais quoi, ils n’avaient donc vraiment rien à se dire ?…

Naïvement, comme on parle à un enfant, la jeune fille demanda encore :

« Et vous vous appelez ?

— Paul, fit tranquillement l’instituteur.