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la baie

Nos populations rurales, en laissant modifier leur langage primitif, abdiquent, croyons-nous, leur caractère distinctif ; car il ne faut pas être profond philologue pour savoir qu’un accord latent existe entre le mot et le caractère d’un peuple au point de vue historique et, très souvent, sous l’aspect ethnique. De même que l’histoire de la parole est l’histoire de l’homme dans ce qu’il a de plus intime, l’analyse de cette parole à l’état naturel n’est que l’analyse de sa pensée sous sa forme la plus simple et la plus palpable ; et ce n’est que par ce précis de la parole inculte que le peuple canadien peut être reconnu par son côté le plus individuel.

Aussi, est-ce l’essence même de l’âme canadienne-française que nous saisissons dans ce récit d’un vieux Canadien du « pays de Québec », né, élevé et qui a vécu dans un des trop rares coins du Canada Français où l’on a conservé instinctivement, de génération en génération, la langue que parlaient les aïeux venus de la vieille France, et où d’anciennes gens sont restés si français qu’il n’y a pas cinquante ans, des vieux vivants en des paroisses au nord de Québec demandaient à des étrangers qui leur rendaient visite des nouvelles du roi de France.