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la baie

je crois qu’elle aimait autant retourner à Chicoutimi où elle s’était déjà faite. Quant à Camille, ah ! là, je vous garantis qu’il se fît pas prier pour retourner à sa grand’scie. Ce que c’est que les vocations ! J’y comprenais rien. Aimer mieux passer toute sa vie à clairer une scie ronde que de travailler une belle terre toute faite, reluisante au soleil et qui serait à soi dans quelques années ! Ça me surpassait et encore plus ma vieille qui ne cessait plus de traiter Camille et sa femme de fous à lier.

Et nous revoilà seuls, Ernestine, Joseph et moi. Autant, d’ailleurs, mettre Joseph de côté, tout de suite. Pour nous autres, vrai ! le pauvre enfant ne comptait plus. Il était pris, à présent, par toutes sortes de folies. Une veillée n’attendait pas l’autre. Tantôt, c’était à Chicoutimi, tantôt à Saint-Alphonse, et des fois à Saint-Alexis. Je disais souvent à Ernestine : « Laisse-le faire, il est jeune et il faut qu’il jette sa gourme ; ça peut revenir, des fois, on sait jamais ». C’était ma dernière espérance que ça reviendrait, surtout si ses amours avec cette fille de Chicoutimi venaient à cesser.