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LE FRANÇAIS

Il n’était pas jusqu’aux rochers si attristés dans l’anéantissement de l’hiver qui n’échangeaient des sourires dans cette renaissance universelle du sol. Les nuits maintenant tombaient douces, claires, parfumées des essences capiteuses des bourgeons restés longtemps à cause du soleil vif du jour. Des bouffées chaudes de sève traversaient l’espace et l’on sentait pleuvoir comme des germes légers. Le pollen, cette fécondation éternelle, volait par couches appelant partout, dans les forêts, dans les champs et dans les savanes de l’Outaouais supérieur, la résurrection et la vie.

Les Rogations annoncèrent que la Nature, toujours vivante, toujours féconde, apportait à la date fixée, aux habitants du pays de Québec, le signal du travail.

Dans les paroisses québécoises, l’on fait ponctuellement la procession des Rogations et, sur les routes, sèches et grises, les habitants des paroisses suivent leur curé qui bénit la terre s’entr’ouvrant pour les éclosions prochaines… La grande croix d’argent précède la théorie des enfants de chœur et une bannière de la sainte Vierge tremble et s’incline sous les efforts passagers du vent, puis se redresse, fière et haute. L’on voit la forte main, calleuse et brune de son porteur, s’élever, un instant, le long de la hampe, pour résister aux coups de la brise…

« Sancta Dei genitrix ! » clament les chantres en surplis blanc qui marchent en regardant attentivement dans leurs gros « paroissiens notés ».