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Peter McLeod


— V —


Avec la mi-décembre, l’hiver était venu tout de bon et avait étendu sur le Haut-Saguenay ses plus beaux draps blancs. Les rafales dressaient leurs tentes blanches autour du village de Chicoutimi et, trois jours sur cinq, la tumultueuse cavalerie des vents en tentait l’assaut. Elle faisait, la nuit, un tintamare de tous les diables. Quand elle se taisait, le gelée se mettait à pincer et à faire gémir choses, bêtes et gens. Puis elle relâchait un peu. Le temps se réchauffait un brin, les vents étaient moins hargneux. Alors le ciel se mettait à descendre si bas, si bas qu’il paraissait reposer sur la cime des pins. Il devenait morne, gris et mat. Et voilà que la neige se mettait à tomber à larges flocons : tomber à croire qu’elle ne devait jamais plus s’arrêter.

Et maintenant les arbres sont ouatés : des arbres de Noël.

La terre est entièrement recouverte de sa toison d’hiver. Le monde est gazé de blancheurs bleutées. Et la neige tombe, tombe sans arrêt. Les flocons, dans l’air, se croisent, inextricables, innombrables. Tout est noyé dans une mer immaculée. Il n’y a plus rien de distinct à l’œil. Les maisons et les cabanes ne ressemblent plus qu’à de gros tas de neige d’où s’élèvent