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se cache-t-elle ? — cette fortune récalcitrante et si capricieuse après laquelle il court depuis déjà si longtemps sans avoir encore pu en considérer le moindre attrait, en attraper la plus petite parcelle ; Ah ! il le sent bien maintenant, il va falloir y renoncer tout de bon ; il comprend enfin, qu’il a lâché la proie pour courir après l’ombre, insensé qu’il est !… Il lui fallait donc aller au bout du monde, manger de la misère jusqu’à s’en gorger, endurer les souffrances sans nom de deux longues années d’exil, pour apprendre que ce qu’il cherchait, c’est précisément ce qu’il vient de quitter !…

Quand, chaque année, des milliers d’individus se détachent de tous les coins de la vieille Europe, où ils ne sont plus capables de vivre, et s’en viennent sur nos bords chercher un peu de travail dans nos champs et dans nos industries, qu’est-ce que peut bien faire un petit Canadien, accoutumé à la vie, large quoiqu’on dise, des cultivateurs de notre province, qui s’en va remplacer, là-bas, un de ces malheureux qui y mouraient de faim ?…

« Voyons, se dit Paul, je suis un immigrant, et qu’est-ce que font, en arrivant, ceux qui vont chercher de l’ouvrage dans mon pays ? » Il en avait vu arriver jusque dans son village de ces pauvres affamés des villes et des campagnes européennes, quoiqu’à cette époque, l’immigration intense et folle, qui menace de