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me fumait. Une vapeur laiteuse, diaphane, montait en papillotant, comme un encens léger vers la voûte d’une chapelle. Les chaumes et les bardeaux des toitures et les champs, blonds d’épis mûrs, réverbéraient l’éclat terni et brûlant du jour. Dans les cours, où miroitaient quelques restes de boue gluante, des poules se pelotonnaient tristement, alourdies, la tête sous l’aile en attendant que s’allongeât un peu vers elles l’ombre droite des arbres et des bâtisses…

Un bruit de pas sur la paille devant la grange, toute la gente volatile qui s’ensauve en gloussant de mécontentement, et la grande porte du bâtiment s’ouvre en grinçant ; aussitôt une ombre noire s’allonge dans la plaque éblouissante de soleil que la porte a fait tomber sur l’aire… Jacques Pelletier se réveille en sursaut et se lève en s’étirant :

— Monsieur le curé !…

— Bonjour, Jacques !… J’arrive de la maison où ta femme m’a dit que tu dormais ici… En fait-il une chaleur ! Nous allons avoir certainement de l’orage tout-à-l’heure… La récolte va être bonne, je suppose !

— Oui, assez, monsieur le curé, malgré qu’elle ait souffert un peu de la sécheresse, c’est l’avoine surtout qui a attrapé du mal ; elle est rouillée. Je crois tout de même que le rendement va être assez bon… Si je peux au moins