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versement du sol sans grandeur avec un fond d’arbres grêlés ou hérissés de grues aux bras noirs, parsemé de baraques qui violent la sérénité de la solitude. Tout cela tient un peu du chantier, du terrain déchiré par des obus ou par une érosion cutanée qui aurait mordu le sol de sa lèpre. Ici et là, aux mines même saigne l’écorchure des diggings : une glèbe cuivreuse qui se convulse en escarpements tortueux, se fore en plaines inégales, peuplées d’autres hommes acharnés à corroder du pic un tissu qui résiste et se défend… Là, des déblais tassés par la pluie ont laissé couler sur un fond d’herbe pâle leurs traînées argileuses, vite figées en paraphes d’abandon…

À la vérité, on n’aime guère en général ce genre de ville : comme tout le moderne, il est de n’importe quelle ville.

Somme toute. Val d’Or, telle qu’elle est, encadrée de douces collines légèrement boisées, élargissant l’horizon, est une petite ville avenante. Et puis, elle commence et finit là ; nul vestige de banlieue, si l’on excepte la jolie petite ville de Bourlamaque qui est comme son quartier fashionable. Dès la sortie de la ville, le rail déroule son long ruban d’acier à travers des bois de sapins et de bouleaux, parsemés de minuscules défrichements de colons sur lesquels veille le classique « campe » de bois rond à queue d’aronde. Car en pays abitibien, le défrichement