Page:Pouchkine - Eugène Onéguine, trad. Paul Béesau, 1868.djvu/99

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— Mon enfant chérie, je prends Dieu à témoin que je ferai tout ce que tu voudras !

— Eh bien, envoie tout doucement ton petit neveu porter ce billet à O…,.. à celui… à notre voisin ; et recommande bien de ne pas me nommer.

— Mais à qui donc, mon ange ? Maintenant, vois-tu, je comprends mal ce que l’on dit, et puis… nous avons autour de nous beaucoup de voisins, je n’en sais pas même le nombre…


— Comme tu as peu de sagacité, ma pauvre bonne ! tu ne devines donc pas ?…

— Enfant de mon cœur, je suis vieille, bien vieille ; mon esprit est devenu si faible ! Tatiana, jadis j’étais fine, jadis une parole de mes maîtres, et…

— Ah ! ma bonne, tout cela n’est pas la question ! Qu’ai-je à faire avec ton esprit ? Comprends-moi donc : il s’agit de porter une lettre à Onéguine !

— Bien, bien, ne te fâche pas, mon âme ; tu sais que j’entends mal… Mais qu’as-tu donc ? Tu deviens toute pâle ?

— Ma bonne, ma bonne, mais je n’ai rien, je te jure. Envoie donc promptement ton petit neveu !… »