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Page:Pougy - Idylle saphique, 1901.djvu/253

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IDYLLE SAPHIQUE

Elle faisait la moue :

— Et si je n’avais pas été là ?

— Alors, soirée banale, mais le souvenir de ce matin que la neige faisait clair et floconneux m’avait pénétré de sa douceur, et puis vos paroles… chacune d’elles… j’y ai tellement songé, ne riez pas de moi !

Sa voix muait, prenant des inflexions tendres et subitement enfantines…

Vous m’aviez dit que j’avais de jolis yeux bleus… alors je me suis regardé… souvent, comme ceci, voyez !…

De sa main largement ouverte il voilait le bas du visage, découvrant seulement le front et les yeux…

Et j’ai trouvé une chose qui m’a ravi !… Vous ne voyez pas ? Tenez, c’est frappant pourtant, à mon idée du moins !… examinez-moi bien… bien… vous ne remarquez pas quelque chose ?

Annhine le considérait, chercheuse, sans trouver le mot de l’énigme. À la fin, il lui prit la main et la conduisant :

— Venez devant la glace, il faut que vous trouviez, faites comme moi.

Elle imita son mouvement.

— Eh bien ! vous ne voyez rien ?

— Non, c’est-à-dire… si… — découragée elle abaissa la main. — Non, je préfère vous avouer que je n’y suis pas du tout !

Il s’écria d’un ton outré :