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Page:Pougy - Idylle saphique, 1901.djvu/81

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IDYLLE SAPHIQUE

vendus tous les deux il y a cinq minutes, c’est à devenir enragée !

— Tous les deux ? À lui sans doute ?

— Non, à une dame !

— Pauvre chérie ! Vrai, tu n’as pas de chance !

— Quand je te le dis, et tu me taquines… je vois bien que tu as envie de rire… Oh ! ne te gêne pas, va… et Annhine tourna la tête vers la fenêtre prête à fondre en larmes. Bon ! je voulais sortir… aller respirer un peu en dehors de Paris et maintenant voilà qu’il pleut ! Tiens, je me sauve, il me semble que je vais éclater, je me tiens à quatre pour ne rien casser… Adieu, Altesse !

Et elle disparut comme un éclair.

Elle se fit conduire à la porte Dauphine. Là elle trouva miss Florence en attente au fond d’un fiacre. Cela la dérida un peu. Elle lui raconta sa petite histoire :

— Comprends-tu cela, chérie ? Ah ! il me le paiera, ce misérable, et j’ai l’adresse des malheureux. Allons-y tout de suite, ils ont peut-être faim, j’ai de l’argent sur moi. Puis j’ai une envie de lâcher la cambuse, ce soir, de dîner avec toi à la campagne. Si cela t’est possible on y passera la soirée, nous reviendrons très tard…

— Oui ! chérie, je ne demande pas mieux ; je suis libre pour jusqu’à minuit au moins. Willy se prépare à retourner en Amérique. Il part dans trois jours, en chagrin et en jalousie, pour attendre que je lui