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CHAPITRE V

studiosus musicæ


Aux premiers jours de septembre de l’année 1830, les orages politiques qui ont soufflé sur Paris pendant l’été s’amassent dans le ciel de Leipzig. Le roi de France Charles X avait été détrôné. La foule revit le vieux La Fayette à cheval, s’écriant comme en 1790 : « La liberté triomphera, ou nous périrons ensemble. » Ce rude vent d’insurrection populaire tout à coup se lève sur la Saxe, brimée par sa police, mal gouvernée par un cabinet dépensier, administrée avec insouciance par des magistrats qui prennent dans les tripots et les maisons clandestines leur revanche sur les dures années napoléoniennes. On apprend de Dresde que le roi a dû nommer son neveu Frédéric-Auguste régent de ses États, et celui-ci a aussitôt accordé une nouvelle Constitution. L’époque sent la poudre, les violences. Un enthousiasme héroïque se propage aux noms acclamés de La Fayette, de Kosciuszko, de lord Byron.

Les étudiants de Leipzig à leur tour font grève et se joignent aux masses ouvrières. Quelques-uns d’entre eux ayant été arrêtés dans une bagarre, ils se rassemblent tous, corporations en tête, défilent par les rues en chantant et se portent vers les prisons pour délivrer leurs camarades. On les relâche. Mais comme il faut à ces excités au moins quelques victimes, l’idée chauffe sous les casquettes multicolores de