Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome I.djvu/177

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les dispositions où je m’entretenais secrètement. Mais je fus moins tranquille après une autre découverte que je ne dus point à mes propres soins, et qui précipita celle de plusieurs intrigues qui ont jeté beaucoup d’amertume dans la suite de ma vie.

Il y avait environ six semaines que je faisais ma demeure à Oru, et qu’étant témoin sans cesse de ce qui se passait dans ma maison, j’étais charmé de la paix et du contentement que j’y voyais régner. Synèse était constamment avec Théophé ; mais je ne la quittais pas plus que lui. Je n’avais rien remarqué dans leur liaison qui blessât l’opinion que j’avais qu’ils étaient du même sang, ou plutôt n’ayant pas le moindre doute qu’ils ne fussent enfants du même père, il n’avait pu me tomber dans l’esprit aucune défiance de leur familiarité. Synèse, que je traitais avec la tendresse qu’on a pour un fils, et qui s’en rendait digne en effet par la douceur de son caractère, vint un jour me trouver seul dans mon appartement. Après m’avoir tenu quelques discours indifférents, il tomba sans affectation sur la difficulté que son père faisait pour reconnaître Théophé, et, prenant un langage qui me parut nouveau dans sa bouche, il me dit que, malgré le plaisir qu’il trouvait à se croire une sœur si aimable, il n’avait pu se persuader sincèrement qu’il fût son frère. Mon attention étant excitée par cette déclaration, je lui laissai tout le temps de continuer. La confession du