Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome I.djvu/48

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Mon étonnement fut que le Sélictar, loin de s’opposer au parti qu’elle prenait de se retirer, donna ordre qu’on lui ouvrît la porte de sa maison, et me reçut d’un visage fort tranquille, lorsque je retournai vers lui.

« Je loue, me dit-il, le généreux sentiment qui vous intéresse au bonheur de cette jeune Grecque, et je le trouve si désintéressé qu’il excite mon admiration. Mais puisque vous l’en jugez digne, l’opinion que vous avez d’elle sert à confirmer la tendresse qu’elle m’a inspirée. Elle est libre, continua-t-il, et je ne vous accuse point d’avoir préféré sa fortune à ma satisfaction. Mais je vous demande une grâce, dont je vous promets de ne pas abuser. C’est de ne pas permettre qu’elle s’éloigne de Constantinople sans ma participation. Et vous ne serez pas lié longtemps par votre promesse, ajouta-t-il, car je vous engage la mienne, que vous saurez dans quelques jours quelles sont mes intentions. »

Je ne fis point difficulté de lui accorder une faveur si simple. Ayant même appréhendé qu’il ne lui restât quelque ressentiment de ma conduite, je fus charmé de me conserver à ce prix son estime et son amitié.

Quelques affaires que j’avais à terminer le même jour, me firent différer jusqu’au soir la visite que je devais à ma jeune Grecque. Le hasard me fit rencontrer Chériber. Il me dit qu’il avait vu le Sélictar, et qu’il l’avait trouvé extrêmement satisfait de son esclave.