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Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome II.djvu/166

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passagers, gens qui, par leur équipage et leurs manières n’avaient pu tenter le capitaine et moi de former avec eux la moindre liaison. Ils n’en avaient eu qu’avec quelques matelots de leur pays, avec lesquels ils étaient à boire continuellement ; et c’était dans ces agréables parties qu’ils avaient concerté de poignarder le capitaine et son lieutenant, assez sûrs de trouver peu de résistance dans le reste de l’équipage, qui était en fort petit nombre. Leur dessein à l’égard de moi et de mes gens, était de nous jeter sur quelque rivage écarté de l’île de Corse, et de se saisir de tout ce que j’avais apporté avec moi. Par un soin extraordinaire de la Providence, mon valet de chambre s’endormit sur les ponts dans l’obscurité de la nuit. Il y fut réveillé par les discours de ces malheureux assassins, qui, s’étant assemblés pour régler l’exécution de leur entreprise, distribuaient entre eux les principaux rôles, et faisaient déjà le partage de l’autorité et du butin. L’usage du capitaine étant de paraître à la fin du jour sur le tillac, il fut résolu qu’on se déferait de lui au même moment, tandis que deux des complices frapperaient à la cabine du lieutenant, pour lui couper la gorge aussitôt qu’il ouvrirait sa porte. Les autres doivent être répandus dans le vaisseau, et tenir tout le monde dans le respect par leurs menaces et par la vue de leurs armes. En convenant de me traiter avec quelque sorte de respect et de me laisser