Page:Pradez - La Revanche du Passé, 1900.djvu/174

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Il lui sembla que tout le passé ressuscitait, peuplait soudain sa morne solitude de fantômes légers et joyeux.

L’impression violente des joies pleines de ce temps-là la pénétra jusqu’aux moelles. Elle serra l’une contre l’autre ses mains sèches, nerveuses, et un sanglot l’étrangla :

— Ô mon Dieu, mon Dieu ! Est-ce que vraiment je mérite de souffrir ainsi ?

Au milieu du désastre de sa vie, tout ce qui subsistait en dehors de son expérience immédiate, tout ce qui n’était pas en connexion directe avec le drame de sa jeunesse et ne touchait pas au sort de l’enfant jeté par elle à une destinée incomplète avait depuis longtemps cessé d’occuper son esprit.

Au début de son malheur, lorsque la trahison qui la livrait au déshonneur était devenue une certitude, qu’elle avait senti l’horrible désespoir de l’abandon lui labourer le cœur, elle s’était tournée, ardente, vers quelque secours miraculeux qui pût créer une issue à l’impasse désolée où elle s’était jetée. Mais