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lointain. À l’ouest, à l’extrémité d’un roc aigu, le feu d’un phare venait de s’allumer. Très avant dans la mer, il étincelait fixe et solitaire. Germaine dit, indifférente :

— Il faut aller à présent, mon enfant.

Isabella passa familièrement son bras sous celui de sa belle-mère et les deux femmes traversèrent le bourg pour aller rejoindre la route des falaises. Elles se parlaient à mi-voix, intimes.

— Quelquefois, maman, dit Isabelle, je voudrais redevenir toute petite. Il y a tant de choses qu’on ferait aller différemment si l’on pouvait seulement tout recommencer depuis le premier jour ! Chaque fois que je pense au passé, j’ai cette impression. Et vous ?

— Non, dit Germaine, la bouche amère, à quoi bon ? Nous serions toujours entourées des mêmes apparences, des mêmes mensonges. Il n’y aurait rien de changé.

Isabelle ne répondit pas. Mais au bout d’un instant elle entoura de son bras la taille frêle de sa compagne et la pressa contre elle silencieusement. C’était le seul moyen dont elle disposât pour exprimer sa sympathie au sujet d’une épreuve, devinée depuis longtemps, et que son propre père infligeait. Ainsi enlacées,