Philippe demeura longtemps silencieux. C’était la première fois qu’il avait la claire perception que, depuis des années, Isabelle jugeait son attitude vis-à-vis de Germaine. Dans la partialité qu’elle montrait à sa belle-mère, il y avait donc eu, de tout temps, une pensée compatissante, un désir voulu de compensation.
Il sonda les plis entr’ouverts de l’avenir. Dans une proximité effrayante, il voyait se dessiner la vie qui serait la sienne lorsque, Isabelle, suivant l’appel de sa destinée, l’aurait quitté. Une vie d’effort et de support, une vie faite de contrôle incessant exercé sur ses instincts, une vie solitaire à côté de Germaine ! Il dit enfin lentement :
— Germaine ne souffrira plus injustement par ma faute. Ce que je t’ai promis, je le tiendrai. Je ne puis pas m’engager à autre chose… Mais, toi, Jacques…
— Ne pense pas à moi, protesta Jacques vivement, j’ai ma mère. Ne t’inquiète pas de moi. Je ne serai pas seul, j’ai ma mère. Elle ne me quittera jamais. Et puis il y a le travail… Je travaillerai. Surtout, je t’en prie, ne pense pas à moi… je ne puis pas le supporter !