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m’a pris du temps. Ensuite je suis retourné à pied chez la petite Fisch. Vous savez comme c’est loin, mais je suis content d’y être allé. Elle va mieux. Pour le moment elle est hors de danger.

Sur la pâleur du ciel, l’arc mince de la nouvelle lune brillait. Un ouh-ouh de bête aquatique montait des jardins, note solitaire frappant l’air à intervalles réguliers. Sur la ville, sur ses eaux dormantes, sur l’étendue des champs cachés sous les vapeurs, le calme de la nuit régnait, et dans la chambre, où l’obscurité s’était faite, un silence s’était établi. À côté l’un de l’autre, Jacques et sa mère étaient heureux d’un bonheur sain et solide que le fracas de démonstrations bruyantes ne troublait jamais. Ils se turent longtemps, écoutant le ouh-ouh de la bête invisible se poursuivre infatigablement et suivant des yeux, sur le ciel serein, la course lente de la nouvelle lune.

La mère dit enfin :

— Tu m’as laissée trop longtemps seule, ce soir, mon enfant. Quand je reste ainsi livrée à moi-même, je ne peux pas empêcher le retour des mêmes pensées. J’ai beau faire, elles m’obsèdent malgré moi, je ne peux pas les