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LE ROMAN CONJUGAL DE M. VALMORE

tains éditeurs ; à elle, ils ne lui ont rien rapporté. C’est l’éternelle histoire de Chatterton, dont Vigny n’a jamais réussi à faire sentir la tragique amertume.

Pour vivre, pour faire vivre les siens, Valmore continuait à débiter des alexandrins, à endosser des costumes bizarres, à se barbouiller de blanc gras et à se poudrer de vermillon. Une grande lassitude l’envahissait ; car il ne voyait rien poindre du côté de Paris, et le jeu de navette recommençait entre les villes de province. Il avait fallu regagner Lyon. et pour plusieurs années ; la presse l’accueillait bien, tout en faisant les plus grands compliments à sa femme, ce qui finissait par lui être désagréable. Il est gênant d’être le mari d’une muse, mais quand on est comédien, que l’on a soi-même un besoin impérieux de réclame et de popularité, cela devient très difficile.

Son humeur s’en ressentit. Leur petit logement situé tour à tour sur la vaste et célèbre place Bellecour ou sur la moins glorieuse place Saint-Clair, abrita plus d’une bouderie. Que Marceline demeurât auprès de lui à raccommoder ses costumes ou à peigner ses perruques, elle n’avait aucun soin de sa renommée ou de sa carrière, alors qu’il lui eût été si aisé de le ramener triomphalement à Paris, avec l’aide de tous les écrivains qu’elle avait conquis : Sainte-Beuve, Alexandre Dumas, Victor Hugo, tant d’autres ! Mais