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LE ROMAN CONJUGAL DE M. VALMORE

tôt, notre Valmore, donner la réplique à Mlle Mars, dans l’extravagante Clotilde, de Frédéric Soulié, et, jaloux des lauriers de Mélingue, s’essayer même dans Buridan de La Tour de Nesle ! Quelle horreur quand on a rêvé d’être Orosmane ! Il essaiera de se rattraper en jouant la comédie, que les romantiques n’ont pas détrônée. Là, malgré quelques succès dans Tartuffe, que, d’ailleurs, il poussait trop au noir — ce qui plaisait aux bourgeois anticléricaux de l’époque — il restait trop lourd, trop appuyé, trop marqué par son métier et ses goûts de tragédien classique. Cela devait lui jouer plus d’un mauvais tour.

D’autant que l’enthousiasme n’y était plus. Les comédiens accusent toujours les spectateurs d’incompréhension et d’injustice. Lorsque ces derniers les obligent à adopter un genre qui leur déplaît, des rôles qui ne les flattent point, ils se laissent envahir par le dégoût. Valmore, comme sa femme jadis, en venait à exercer tout simplement un métier.

— Je te plains, lui écrivait Marceline, en songeant que, tous les soirs, tu combats ton aversion pour soutenir ta famille absente.

En effet, le pauvre diable ne tardait pas à se trouver seul à Rouen dans un humble logis de la rue du Grand-Pont. Quand elle fut bien sûre qu’il était accepté par le public, Marceline n’y tint plus. Elle découvrit de nombreux prétextes pour aller revoir Paris et ce qui l’y attirait.