Page:Premier recueil de diverses poésies tant du feu sieur de Sponde que des sieurs Du Perron, de Bertaud, de Porchères et autres, non encor imprimées, recueillies par Raphaël Du Petit Val, 1604.djvu/19

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XXVI.


Les vents grondoyent en l'air, les plus sombres nuages
Nous desroboyent le jour pesle mesle entassez
Les abismes d'enfer estoyent au ciel poussez
La mer s'enfloit des monts, & le monde d'orages :

Quand je vis qu'un oyseau delaissant nos rivages
S'envole au beau milieu de ces flots courroucez,
Y pose de son nid les festus ramassez
Et rappaise soudain ses escumeuses rages.

L'amour m'en fit autant, et comme un Alcion
L'autre jour se logea dedans ma passion
Et combla de bon-heur mon ame infortunee.

Apres le trouble, enfin, il me donna la paix :
Mais le calme de mer n'est qu'une fois l'annee
Et celui de mon ame y sera pour jamais.


STANCES.

 

Tel estoit ce bel astre à son entree au monde
Et deslors qu'il sortoit de son tendre berçeau,
Clair au poind qu'on le veit autant que le flambeau
Qui luit le jour diffus, & la nuict dessous l'onde,

Ce feu sur le poignant de sa premier Aurore
Nous enbasmoit les champs du nectar de ses pleurs,
Et les champs repousseoient un doux printemps de fleurs,
Encore les pleurs couloyent, les fleurs croissoyent encore.

Les lis croissoyent sur tout, le lis que ce feu mesme
Regardoit d'un rayon si benin de ses yeux
Qu'on soupçonna deslors qu'il aimeroit bien mieux :
On voit de meilleur œil, tousjour ce que lon aime.

La mere des amours, à demy fletrissante
Veit reverdir son Myrrhe en toufeaux ombrageux :