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Page:Prieur - Notes d'un condamné politique de 1838, 1884.djvu/153

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XVI

UN CHAPITRE QUI COMMENCE ET FINIT PAR LA MORT.


Dans le cours de la seconde année de notre séjour à Long-Bottom, deux de nos camarades tombèrent malades au point qu’il devint nécessaire de les transporter de l’établissement à un hôpital, situé à huit milles de distance.

Gabriel Ignace Chèvrefils était atteint d’une inflammation d’intestins, et Louis Dumouchel, d’une hydropisie.

La maladie de Chèvrefils, d’après l’opinion de notre compagnon le Dr Newcombe, qui, en dehors de ses travaux, exerçait son art au milieu de nous avec toute la charité possible, la maladie de Chèvrefils était due à l’inanition suivie d’un écart de régime. Ce brave, honnête et religieux compagnon était d’une stature colossale et doué d’un appétit extraordinaire, en rapport avec sa taille, lequel appétit il n’avait jamais pu satisfaire une seule fois depuis notre départ du Canada, bien que, quelquefois, il reçût une petite part de ration, tantôt de l’un tantôt de l’autre de ses camarades, qui, pourtant, n’en avaient guère assez. Un soir, s’étant procuré une certaine quantité de ce blé-d’inde grillé dont nous faisions une espèce de café, il en mangea poussé par la faim : ce fut ce qui amena chez lui l’affection dont je viens de parler.

Chèvrefils et Dumouchel furent transportés à