Page:Procès-verbal de la Commission Municipale du Vieux Paris, 1898, 7.djvu/21

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tumulaires ont été néanmoins transportés à Carnavalet.

Le 13 août, à l’angle des rues Saint-Jacques et Malebranche, on a rencontré, dans les fouilles exécutées pour la construction d’un égout, la rigole connue sous le nom d’aqueduc romain d’Arcueil, qui conduisait, au temps de l’empereur Julien, les eaux de Rungis au palais des Thermes, et dont le musée Carnavalet possède un intéressant fragment comme échantillon. Cette rigole est formée de trois plans droits, l’intérieur horizontal et les deux autres verticaux ; elle a, au point qui nous occupe, 0 m. 48 c. d’ouverture et 0 m. 70 c. de profondeur ; l’épaisseur de ses côtés est de 0 m. 40 c, et celle de son fond 0 m. 23. Elle est construite en béton composé de mortier de chaux et de cailloux mêlés de débris de moellons. Ses parois intérieures sont enduites d’un ciment de tuileaux, facile à reconnaître à sa couleur rose, qui s’étend jusque pardessus ses bords arrondis. Elle n’était pas couverte de dalles de pierre, et par conséquent l’eau y devait couler à découvert. L’ancien sol romain, que nous avons relevé ici à la cote 54,97, est donc au niveau du dessus des bords de la rigole, qui était construite à fleur du sol. Les terres situées actuellement au-dessus sont des remblais, sur 3 m. 45 c. de hauteur, compris l’épaisseur du pavé dont le dessus est, par conséquent, ici, à la cote 58,42. La profondeur de la rigole étant, avons-nous dit, de 0 m. 70 c, la cote du radier serait donc à la cote 54,27.

La rigole ainsi découverte a été reconnue par nous, en présence de M. le docteur Lamouroux et de M. Lassalle, conducteur des travaux, sur 3 m. 50 c. de long ; elle suit à peu près, comme direction, l’ancien alignement de la rue Saint-Jacques, du côté des numéros pairs.

Il n’y avait, du reste, pas bien longtemps que la rigole romaine avait déjà été signalée dans ces parages. En effet, au mois de décembre 1897, en fouillant aussi le sol pour la construction d’un égout, à l’angle des rues Saint-Jacques et Royer-Collard, c’est-à-dire à environ 65 mètres de la rue Malebranche, elle fut mise à jour sur 3 mètres de long, et le niveau de son radier fut relevé à la cote 54,33.

Or, d’après le profil en long de la rigole romaine dressé par l’ingénieur Belgrand et contenu dans son ouvrage intitulé : Les anciennes eaux de Paris, nous avons pu constater que les cotes trouvées rue Royer-Collard et rue Malebranche concordent assez exactement, comme pente, avec celles indiquées par ce profil à l’angle des rues Saint-Jacques et Gay-Lussac et près de l’emplacement de l’ancienne église Saint-Benoît, c’est-à-dire aux deux derniers points où cette rigole avait été repérée jusqu’à présent. Les deux repères nouveaux de la rue Royer-Collard et de la rue Malebranche permettent donc de combler en partie le long intervalle de 590 mètres qui sépare les deux anciens repères de la rue Gay-Lussac et de l’église Saint-Benoît indiqués par Belgrand.

C’est du côté de l’ancienne porte Saint-Jacques que fut d’ailleurs rencontrée, en 1544, la même rigole romaine dont parle Gilles Corrozet dans ses Antiquités de Paris, à propos de la construction des remparts et bastions que l’on entreprit cette année là en prévision d’une invasion des armées de Charles-Quint. Mais ce repère n’est plus visible aujourd’hui et l’on ne connaît plus guère de trace de cet aqueduc jusqu’au palais des Thermes.

La construction d’un autre égout, rue Lhomond, pendant le mois d’août dernier, nous faisait espérer quelque nouvelle découverte intéressante ; mais là on n’a trouvé rien autre qu’un fragment de hache polie en granit vert foncé, trouvé à 4 m. 50 c. de profondeur, vis-à-vis de la maison portant le numéro 14. Nous avons pu cependant constater que, en cet endroit, l’ancien sol romain se trouve à 3 mètres au-dessous du sol actuel.

Nous devons aussi parler des fouilles exécutées, place du Petit-Pont, au nom de la 2e Sous-commission.

Lors du remaniement de l’égout de la rue du Petit-Pont pour sa jonction avec le nouveau collecteur qui passe sous les rues de la Bûcherie et de la Huchette, l’aspect tourbeux et noirâtre des déblais qui sortaient du puits de service avait attiré notre attention ainsi que celle de plusieurs archéologues, notamment de M. Rollain, membre de la Société d’anthropologie, qui tout le premier s’en préoccupa. Parmi ces déblais on avait remarqué la présence de quelques débris de poteries très grossières, paraissant dater des temps les plus reculés, puis de nombreux morceaux de cuir très minces, des bouts de pieux en chêne, etc. En face d’un cas tout aussi particulier où, pour éclairer nos investigations, les textes et les parchemins n’auraient peut-être pu nous suffire, nous pensâmes qu’il devenait plus prudent de nous en prendre au sein