Page:Procès verbaux des séances de la Société littéraire et scientifique de Castres, Année 2, 1858.djvu/12

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Et d’abord, permettez-moi de le dire, nous avons songé à nous-mêmes. Les études, quelque direction qu’elles prennent, n’aiment pas, elles ne veulent pas l’isolement. Si l’homme a besoin d’être seul face à face avec sa pensée, pour l’agrandir et la féconder, si ce travail intérieur demande la concentration de toutes ses facultés, et l’éloignement de toute distraction ; lorsque l’œuvre est achevée, elle réclame, elle exige ces confidences intimes qui sont une première récompense de tout effort intellectuel, en attendant qu’elles deviennent la plus puissante garantie de son succès. Où pourrions-nous trouver, mieux que dans une société comme la nôtre, les occasions de nous laisser aller à ces épanchements qui mettent à nu l’âme de l’écrivain, sans jamais engager de susceptibilité vaniteuse ? Rattachés les uns aux autres par les mêmes goûts, rapprochés par les mêmes préférences, nous pouvons appliquer nos facultés selon leurs aptitudes diverses, en appréciant, en encourageant, en nous dirigeant mutuellement par des conseils, par des indications utiles. N’est-ce pas un avantage inappréciable, que de pouvoir se réunir autour d’un même centre, d’être sûr de trouver auprès des confrères estimés, cette sympathie dont l’âme a toujours besoin, et dont on apprécie d’autant plus la douceur, que l’on vit plus habituellement de cette vie intellectuelle manifestée par les préoccupations littéraires et scientifiques ?

Les lettres et les sciences n’ont point de drapeau exclusif. Concentrées dans leur sphère, inaccessibles à ces passions d’un moment toujours injustes, trop souvent dangereuses, elles habituent les esprits les plus absolus, à cette tolérance intelligente qui ne fait jamais remonter jusqu’à l’homme, la répulsion que doit inspirer l’erreur, sous quelque forme qu’elle se produise, à quelque objet qu’elle s’applique. On peut se trouver divisés sur des questions philosophiques ou littéraires, sur l’appréciation d’une œuvre, d’un homme ou d’une époque, sur les théories scientifiques, sur les procédés ou les principes des arts. La diversité des esprits se trahit par la diversité