Page:Procès verbaux des séances de la Société littéraire et scientifique de Castres, Année 2, 1858.djvu/195

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nous exaltons les vertus avec autant d’énergie que nous flétrissons les crimes, il y a, pour chacun de nous, une patrie que la naissance, l’éducation, la longue résidence ou des circonstances particulières ont désignée à nos hommages et entourée de notre affection. Nous avons besoin de la connaître, parce que nous l’aimons, et il ne nous suffit pas de savoir ce qu’elle est, nous voulons encore pénétrer sa vie passée, et nous rendre compte de tous les événements dont elle a été le théâtre : nous tenons à connaître les hommes célèbres qu’elle a produits, les monuments qu’elle conserve, et à suivre l’action intellectuelle et morale à laquelle elle a été soumise.

C’est une curiosité féconde à laquelle il est bon de donner satisfaction, parce qu’elle a un principe honorable et un but généreux. Et c’est là ce qui explique le zèle avec lequel, dans toutes les parties de la France, des hommes et des corps se sont voués à la recherche et à l’étude du passé, de manière à ne pas permettre aux générations présentes, d’être ingrates par ignorance, pour celles qui les ont précédées. L’humanité, à travers les âges et les distances, est un grand corps. Il ne faut pas en séparer les diverses parties, de peur de lui enlever sa vie propre. Tout s’enchaîne, tout concourt à un même but dans la nature intellectuelle et morale, comme dans la nature physique. L’unité est une condition essentielle de la chaîne des êtres. Il importe donc de la rechercher en tout, et ne jamais porter atteinte à ce qui la constitue ou la maintient.

On est trop oublieux, dans les petites localités, pour ce qui s’est accompli : on est trop indifférent pour ce qui reproduit les diverses phases et les épreuves multiples du passé. On ne paraît pas se rendre compte de l’intérêt de famille, qui porte à recueillir pieusement tous ces souvenirs, à les classer, à les dégager de tout ce qui pourrait les dénaturer, et à les faire revivre, dans leur vérité première. C’est une tendance fâcheuse qu’il faut combat-