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Page:Procès verbaux des séances de la Société littéraire et scientifique de Castres, Année 3, 1860.djvu/100

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du centre, cette publication a fourni déjà une assez longue carrière, pour que l’on soit sûr qu’elle répond à un besoin véritable, et qu’elle a en elle-même cette vie qui résulte d’une volonté forte. Son programme est assez étendu pour donner place à un grand nombre de productions, fournir à tous les genres d’activité une occasion de se produire, et permettre de recueillir tous les avantages d’une variété constante. Vers et prose, études d’archéologie, et fragments historiques, souvenirs du paganisme et recherches sur toutes les périodes de l’art chrétien, biographies locales et esquisses étrangères, œuvres d’art contemporaines et critique littéraire, dessins et reproductions de toute sorte, n’est-ce pas assez pour donner de l’intérêt à une publication nouvelle, et lui assurer cette sympathie dont on a besoin pour maintenir l’esprit et le cœur dans ces dispositions qui éloignent d’eux l’incertitude et le découragement ? Voilà ce qu’a été l’Art en province ; voilà ce qu’il a offert à ses lecteurs. Qu’il se borne à son titre, qu’il reste la Revue du centre, car pour être vraiment puissants, les efforts doivent être bornés, et nous aimons à lui prédire un avenir bienfaisant. Faire connaître et faire aimer son pays, c’est un beau rôle. Savoir se contenter de cette gloire modeste qui consiste à recueillir tout ce qui risquait de disparaître, c’est donner peut-être un bien faible aliment à l’amour-propre, c’est se ménager assurément la plus douce des satisfactions et accomplir une mission moralisatrice. Qu’on ne l’oublie pas ; ceux qui se dévouent à leur pays, quelque pauvre qu’il soit en souvenirs historiques ou en œuvres d’art, luttent contre cette tendance au déplacement, qui est trop souvent le signe d’un malaise intérieur, et presque toujours le principe de redoutables désillusions. Or, rattacher les hommes à leur pays en le leur faisant connaître, c’est leur inspirer le désir d’avoir eux-mêmes les vertus qu’ils ont trouvées chez leurs devanciers. On demandait un jour à un philosophe des plus renommés de l’Inde comment il avait acquis cette haute sagesse qui lui valait tant d’hommages ; il répondit : « J’ai respecté ceux qui sont venus avant moi dans le pays où s’est écoulée mon existence, et je ne les ai pas adorés. » Faire connaître les hommes et les choses, sans faveur et sans passion, discerner le vrai