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richard wagner et la france

travers de brumes souvent épaisses, on eût du moins découvert à trois ou quatre reprises, des sommets d’art tellement élevés que l’admiration eût été forcée. » Cette opinion radicale, dont on ne devine que trop les motifs, n’était-elle pas aussi celle du propre directeur de l’Opéra ? On prête à Gailhard ce mot, dont nous ne nous chargeons d’ailleurs pas de garantir la vraisemblance : « Si on me laissait faire, je commencerais par jouer l’Or du Rhin ; ça em… bêterait tellement le public qu’on me f…rait la paix pendant vingt ans avec Wagner ». Si cette parole fut prononcée, ce ne put être qu’en un moment de mauvaise humeur, car il est de notoriété publique, Gailhard le reconnaissait volontiers, que Wagner a fait la fortune de l’Opéra, pendant plus de vingt ans.

Le premier coup décisif était frappé maintenant, grâce, encore une fois, à l’énergie de Lamoureux, qui avait été appelé à diriger les répétitions et les premières représentations, — non sans peine, car une vive opposition se manifesta à diverses reprises, dans le personnel de l’orchestre et de la scène, que sut vaincre le directeur des Nouveaux-Concerts.

Encouragé par l’accueil fait au Lohengrin de l’Opéra, l’éditeur Durand publiait bientôt de nouvelles éditions de Tannhäuser (décembre 1891) et du Vaisseau fantôme (novembre 1892), tandis que MM. Calmann-Lévy rééditaient la traduction de Quatre Poèmes d’opéra, par Challemel-Lacour. En mars 1893, la Walkyrie était annoncée comme devant être donnée prochainement à l’Opéra. La première eut lieu, en effet, le 13 mai, chantée par Mmes Rose Caron, Bréval, MM. Van Dyck et Delmas, sous la direction d’Édouard Colonne, alors