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la question wagner depuis la guerre

disparition du mirage de la « gloire », parce qu’il ne sait pas si, ce brillant décor théâtral une fois enlevé, le tigre ne se trouverait pas prêt à bondir. Il pourrait sans doute se tranquilliser de ce que, derrière cette coulisse, peinte seulement vers l’extérieur, se trouve le singe gambadant, déjà familiarisé avec l’envers de la toile[1].


Mais Taine, dans ses Origines de la France contemporaine, n’a-t-il pas dit quelque chose d’analogue, et ses partisans lui ont-ils jamais reproché ses critiques partiales de la Révolution ? Et peut-on, à bon droit, exiger plus de retenue de la part d’un étranger dont le sens artistique, profondément original, s’était si souvent trouvé à une rude épreuve parmi les Français ?


Rapprochons maintenant de cette diatribe quelques appréciations de Wagner sur ses propres compatriotes, les Allemands d’avant l’Empire.

Dans son étude sur la Musique allemande, écrite et publiée à Paris en 1841, Wagner disait déjà, entre autres choses :


L’Allemand juge avec moins de prévention que personne ; … les Allemands, je le répète, semblent avoir le privilège de s’approprier les créations de l’art étranger pour les perfectionner, les ennoblir et en généraliser l’influence. Hændel et Gluck l’ont prouvé surabondamment, et de nos jours, un autre Allemand, Meyerbeer, nous en offre un nouvel exemple[2].


En 1867, presque dans les mômes termes, il remar-

  1. VIII, p. 150, 163-164.
  2. I, 179. Cette dernière phrase ne se lit pas dans l’original français.