Page:Proudhon - De la Capacité politique des classes ouvrières.djvu/374

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que le peu qu’elle apprend soit pire qu’une complète ignorance ; que refoulée dans l’étroitesse de ses fonctions parcellaires notre classe ouvrière se montre si peu digne de ce beau nom, et qu’elle mérite plutôt celui de classe des manœuvres, classe des mercenaires ! Contradiction odieuse ! Nous avons huit millions de jeunes gens de sept à dix-huit ans, dont le produit, évalué de 10 centimes à 1 fr. par jour, en ne comptant que trois cents jours de travail dans l’année, couvrirait et au-delà les 12 ou 1,300 millions qu’ils coûteraient au Pays, ne laissant à la charge des familles que les frais d’habillement, linge et chaussure. Et ces jeunes gens, nous ne savons en tirer parti ; et parce que, faute de savoir en tirer parti, nous ne savons où prendre les frais que leur instruction réclame, nous les abandonnons à l’exploitation de leurs malheureux parents, ou, ce qui est pire, des grands spéculateurs de l’industrie monopoleuse, et l’ignorance les refoule dans les limbes de la mendicité et du crime.

De là, cette lèpre hideuse de l’ignorance des masses, que les plus conséquents de nos hommes d’État en sont venus à considérer comme de nécessité providentielle, et que la haute exploitation serait peut-être fâchée de voir guérie ; — de là ces institutions de la charité, qu’on croirait inventées tout exprès pour donner à des inférieurs juste le degré de savoir que réclame une consciencieuse obéissance ; de là enfin les impuissances et les hypocrisies du libéralisme. Nos députés de l’Opposition demandent 6 millions 250,000 fr. de crédit à ajouter au budget de 1865 pour faire des études (!) sur l’enseignement gratuit et obligatoire, établir en attendant des