Page:Proudhon - De la création de l’ordre dans l’humanité.djvu/121

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lysée par une même loi et ramenée aux mêmes éléments. Il faudrait qu’en partant d’une science quelconque on pût encore, sans savoir rien des autres, les créer toutes par une sorte d’à priori, ce qui reviendrait à une intégration universelle.

Or, c’est ce que le plus simple coup d’œil, jeté sur les sciences déjà constituées et classées, prouve être impossible. Si quelque chose dans les sciences pouvait faire une synthèse générale, ce ne serait pas l’identité présumée de leurs derniers théorèmes, puisque plus elles font de progrès, plus elles mettent entre elles de distance ; mais bien la communauté de leur objet, et l’identité ou l’équivalence de leurs séries. Mais les sciences différent essentiellement et dans leur objet, et dans leur mode de sériation : une science universelle est donc impossible.

192. Une chose pourtant semble infirmer ce que nous venons de dire, et c’est celle-là même qui nous occupe en ce moment, loi sérielle, la métaphysique. Toutes les sciences, avons-nous dit, relèvent de la métaphysique ; c’est elle qui donne à chacune la méthode et la certitude : comment donc la métaphysique n’est-elle pas la synthèse des sciences, la science universelle ?

Il faut ici prendre garde. Ce qui produit dans les sciences la diversité de série est la diversité de l’objet : or, bien que l’on puisse par l’abstraction de tout objet s’élever à une théorie générale de sériation, les diverses formes de série ne s’expliquent pas les unes par les autres, et il n’y a point de science universelle, parce qu’il n’y a pas d’objet universel.

193. Mais cela même paraît contradictoire : comment, antérieurement à la série, peut-il y avoir multiplicité d’objet ? Cette proposition est pourtant vraie, sinon absolument et dans la réalité des choses, ce que nous ne pouvons savoir, du moins d’une manière subjective et relativement à nous. La substance, la force, le nombre, l’étendue, au milieu de tout cela peut-être un moi primordial, infini, éternel, toutes ces natures naturantes, comme dit l’école, devenant par la série natures naturées, ne se résolvent pas pour nous en un genre suprême ; elles ne forment point entre elles une série que nous puissions vérifier : ce sont autant d’in-