Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 1.djvu/145

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les empereurs ; ce n’est pas non plus un développement comme Apollonius et Jésus lui-même en avaient eu l’idée, legem non solvere, sed adimplere : c’est une antithèse.

Or, comme toute antithèse ne peut, par sa nature, donner qu’une idée incomplète ; comme d’un autre côté toute réaction, dans l’ordre moral aussi bien que dans l’ordre physique, est égale à l’action, il était dès lors permis de prévoir que la nouvelle formule ne contiendrait comme toutes les autres qu’une part de la vérité, si tant est même qu’il y eût de la vérité en elle ; puis, qu’elle irait dans l’évolution de son principe aussi loin que le polythéisme était allé dans l’évolution du sien, ce qui veut dire qu’elle finirait par une chute semblable.

Suivons l’histoire de la palingénésie chrétienne.

Puisqu’on ne sortait pas de l’idée religieuse, et qu’on persistait à regarder le principe transcendantal comme indispensable à la constitution de la Justice, la première chose que le christianisme avait à faire était d’épurer le concept théologique, et de sanctifier, pour ainsi dire, la Divinité, déshonorée par la révélation antérieure. En cela il suivait la route ouverte par la philosophie, il n’avait rien encore d’original.

Un seul Dieu, dégagé de tout attribut physique et anthropomorphique, purgé de tous les scandales dont les anciens mythologues avaient le plus innocemment du monde couvert leurs Immortels ; un Dieu infiniment saint, mais distinct de la matière, cause de toute souillure ; un Dieu principe et sujet véritable de la Justice, que sa grâce communique à l’homme : tel devait être, d’après la loi de contradiction historique, et tel fut en effet le premier article de la foi chrétienne.

On voit dès à présent ce qui servira à l’Église, à peine formée, à démêler son dogme à travers le dédale des opinions que fera bientôt surgir cette première donnée, et à