Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 1.djvu/441

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Étude un fait analogue relativement à la propriété. La propriété, et l’inégalité de condition qui vient à la suite, d’après Malebranche, dom Calmet, et tous les fondateurs d’ordres, n’est pas d’institution divine, c’est un effet du péché originel.

Il en est ainsi du gouvernement. Ôtez le péché originel, la doctrine de l’Église, en matière politique, est l’anarchie. L’institution du pouvoir, à ses yeux, est une suite du mal, une nécessité de pénitence. Et cela est logique : sans propriété, il n’y a pas matière à gouvernement, puisqu’il n’y a pas de droits, pas même d’intérêts. L’horreur des communautés pour toute espèce de compte-rendu le fait bien voir. Tous ne font qu’un. Aussi l’Église, dans sa hiérarchie même, imite de son mieux cette anarchie. Le dogme est invariable, la discipline n’a rien d’uniforme. Autant de maisons religieuses, autant de règles différentes : Alius quidem sic, alius verò sic. Bien que l’obéissance, après la désappropriation, soit la clef de voûte de l’édifice, à proprement parler ce n’est pas au supérieur que la religieuse obéit, c’est à la règle. Obéir à l’homme, contre la règle, d’après saint Bernard, saint Thomas et les plus savants casuistes, serait péché. Or, qu’est-ce que la règle ? Une révélation. De sorte que l’homme qui se désapproprie et jure obéissance à la règle, mourant au monde, c’est-à-dire à la vie politique et sociale, ne reconnaît rien entre Dieu et lui : il est anarchiste. De dire comment se concilie cette anarchie de principe avec l’autorité de fait, c’est une autre affaire : le catholicisme, comme l’économie malthusienne, est le monde de la contradiction.

Je cite les paroles d’un écrivain catholique, M. Huet, citant à son tour MM. Bordas-Demoulin et l’abbé de Sénac. Ce n’est pas pour de semblables propositions que ces messieurs seront excommuniés :