Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 1.djvu/50

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désir de survivance, témoignage d’une destinée ultérieure : je ne me donnerai la peine ni de le vérifier ni de le combattre. Je m’installe à côté de la croyance et lui passe jusqu’à nouvel ordre toutes ses fantaisies. Ma critique se refuse à entrer dans les régions de l’absolu.

Ce que je conteste à la croyance, c’est qu’elle vienne appuyer de ses hypothèses le commandement de la raison pratique, expérimentale et positive, dont les révélations me sont données directement en moi-même et par le témoignage de mes semblables ; raison, à ce titre, douée d’une certitude et d’une réalité à laquelle aucune théologie ne peut atteindre ; raison enfin qui est moi-même, et que je ne puis infirmer sans déshonneur, abdiquer sans suicide.

Si donc, après examen, il se trouvait que la croyance, qu’on me présente comme le gage indispensable de la Justice, au lieu de l’assurer la compromet ; si par une conséquence nécessaire l’Église, organe de la pensée religieuse, était en même temps l’agent de notre tentation ; si tel était le principe de toutes les décadences et rétrogradations humaines ; si c’était par là que la Justice, viciée, nous est demeurée jusqu’à ce jour douteuse : alors, sans tolérer davantage une croyance perfide, j’aurais le droit et le devoir de protester contre une caution déloyale, de prendre, contre l’Église et contre Dieu même, fait et cause pour la Justice, et de m’en constituer moi-même le garant et le père.

Quiconque a étudié ces questions reconnaîtra qu’en ceci je ne fais qu’appliquer les préceptes de la plus pure orthodoxie. C’est la doctrine des saints, que la