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quement repoussée par les princes, et bientôt abandonnée par les théologiens eux-mêmes. Une transaction intervint ; la séparation du spirituel et du temporel fut érigée en axiome de droit public : un nouveau ferment de discorde fut jeté parmi les nations. Moitié païenne, moitié chrétienne, la politique se traîna dans l’infamie ; la Justice fut plus que jamais sacrifiée, et la liberté compromise.


Instruction IV.
Constitution du pouvoir social par la Révolution.


D. — En quels termes la Révolution s’est-elle exprimée sur la réalité du pouvoir social ?

R. — Aucune déclaration expresse n’existe à cet égard. Mais autant la Révolution répugne à l’antique mysticisme, plaçant la Justice et le pouvoir dans le ciel, autant il y a pour elle d’insuffisance dans le nominalisme qui a suivi, et qui tend à faire de l’être collectif et de la puissance qui est en lui, comme de la Justice, des mots, des conceptions. Pas une idée, pas un acte de la Révolution, qui se puisse expliquer avec cette métaphysique. Tout ce qu’elle a produit, tout ce qu’elle promet, serait un édifice en l’air et une nouvelle déception de la transcendance, s’il ne supposait dans la société une effectivité de pouvoir, par conséquent une réalité d’existence qui l’assimile à toute création, à tout être. Du reste, le silence de la Révolution sur la nature du pouvoir ne regarde que les deux premiers actes de ce grand drame : ne sommes-nous pas, aujourd’hui, surtout depuis 1848, en pleine éruption d’idées révolutionnaires ? Et la science, la philosophie, ne se joignent-elles pas à l’induction pour confirmer l’hypothèse ?

D. — Donnez, à défaut de textes, vos motifs ?

R. — La science nous dit que tout corps est un composé dont aucune analyse ne peut trouver les derniers éléments, retenus les uns près des autres par une attraction, une force.

Qu’est-ce que la force ? C’est, comme la substance, comme les atomes qu’elle tient groupés, une chose inaccessible aux sens, que l’intelligence saisit seulement par ses manifestations, et comme l’expression d’un rapport.