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ressusciterait les morts et régnerait avec ses fidèles pendant mille ans, après quoi tout finirait ; on prétendit désormais que cette venue messianique ne devait avoir lieu qu’à la fin du monde, comme la conclusion de toutes choses.

Quoi qu’il en soit, en dépit de la physique, en dépit de Descartes, qui a fondé le nouveau spiritualisme par sa distinction des substances, l’Église a conservé le dogme de la résurrection des corps et l’enseigne dans son catéchisme. Ce n’est plus, il est vrai, comme autrefois, le pivot de la propagande ; mais c’est toujours un article, l’avant-dernier, de la profession de foi, carnis resurrectionem.

Qu’on se figure l’étonnement des Romains à cette idée étrange, quand pour la première fois elle se fit jour dans la capitale de l’Empire, que Tacite, justement à cette occasion, compare à une sentine des folies humaines !

Ces hommes, qui n’osaient en croire les stoïciens sur l’immortalité des âmes, que devaient-ils penser à cette idée inouïe de la résurrection des corps ? La foi aux mânes était traitée par eux de superstition : que serait-ce de la revenance des cadavres ? Une seule chose peut donner l’idée du dégoût qu’ils durent éprouver, c’est la croyance aux vampires, encore répandue chez les peuples slaves, et qui n’a pas d’autre origine que la résurrection. Exitiabilis superstitio, dit Tacite, qui se console presque, à cette idée, du supplice atroce par lequel Néron fit périr ces misérables.

XLVI

Me demanderez-vous, après cela, si le cordial offert par le christianisme contre la peur de la mort produisit de l’effet ?

Hélas ! la maladie était de celles qui ne se guérissent