Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 2.djvu/187

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thèse en dernier lieu, seule rationnelle et morale : telle est la marche invariable de l’esprit humain. La révélation aurait-elle changé cet ordre ? La raison en Dieu procéderait-elle par d’autres lois que la nôtre ? Votre spiritualisme ne va pas jusque là : Puis donc que la Providence a voulu que la Justice se posât dans l’Humanité en trois temps, deux mouvements : premier mouvement, passage de la loi d’égoïsme à la loi d’amour ; deuxième mouvement, passage de la loi d’amour à la loi d’égalité, nous n’avons rien de mieux à faire qu’à examiner l’un après l’autre ces deux termes, Égoïsme, Charité, dont la synthèse, annoncée par la Révolution, sera Justice.

Ah ! Monseigneur, il est cruel d’être trahi par les siens ; pourtant on s’en console. L’homme est sujet à passion, l’amitié fragile ; après tout, la défection d’un frère, d’un enfant, d’une femme, de quelque affliction qu’elle navre le cœur, n’a rien qui étonne le philosophe. Mais être trahi par sa propre pensée, par sa religion, par sa foi, c’est ce qui est intolérable ; et si j’étais que de vous, savez-vous ce que je ferais tout à l’heure ? Je prendrais pour moi le conseil que la femme de Job lui donnait sur son fumier : Benedic Deo, et morere ! J’enverrais promener mon Dieu, et mourrais après.

XVII

Le mosaïsme, que la démocratie néo-chrétienne voudrait faire passer pour un modèle de législation libérale, psychologise peu ; il penche même, mais dans l’expression seulement, vers le matérialisme. Pour l’Hébreu, Jéhovah est un feu qui brille dans le buisson et dévore les impies. C’est à peine s’il est question d’âme et d’esprit ; rouach est le souffle ; nephesch, qui correspond à anima, ψυχὴ, se prend quelquefois pour cadavre.

Mais ce que la langue est impuissante à exprimer, le