Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 2.djvu/20

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tion est par elle-même une profession religieuse et sacerdotale ou une profession purement civile ; si du moins l’Église, qui en revendique le privilége, possède, pour l’accomplissement de cette grande œuvre, une méthode à elle, un talent, une aptitude, un génie qui lui soit propre et qui découle de son dogme, ou pour mieux dire de la grâce attachée à son ministère. Depuis Xénophon jusqu’à Rousseau et Mme Necker de Saussure, l’esprit philosophique a produit de nombreux traités d’éducation, que l’Église a copiés, imités, modifiés ou contredits, comme d’autres copient, modifient ou contredisent les procédés de l’éducation ecclésiastique. En quoi l’Église se distingue-t-elle essentiellement du laïcisme et de la philosophie ?

Pour moi, j’avoue qu’il m’est impossible de lui reconnaître, ici plus qu’ailleurs, la moindre spécialité. L’éducation ecclésiastique ne diffère de l’éducation séculière que par l’esprit religieux et les habitudes de piété qui s’y mêlent : pour le surplus, les maîtres ecclésiastiques procèdent comme les maîtres laïques, à telle enseigne que dans les colléges épiscopaux, hormis les devoirs de piété, dont le prêtre seul est le ministre, on se sert indifféremment, pour tout le reste, de laïques et de clercs.

Ainsi, jusque dans l’éducation, l’Église, pour être quelque chose, est forcée d’empiéter sur le domaine séculier ; elle ne possède rien en propre : tellement l’idéal qui réside en elle est incompatible de sa nature avec tout élément pratique et utilitaire ?

Ces éliminations faites, que reste-t-il pour l’enseignement de l’Église, et que vient-elle faire dans l’éducation ? Quel peut être l’objet de sa pédagogie ?

IV

Toute morale pratique repose sur ce premier principe, commun à la philosophie et à la religion :