Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 2.djvu/270

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dans le monde, c’était la charité, principe de toutes nos institutions de bienfaisance. Mais la charité a besoin de s’éclairer, surtout de se dissimuler, à peine de s’avilir comme aumône et de rester impuissante.

« Faisons donc de la charité une science : ce ne sera pas sans doute lui ôter son caractère religieux.

« Combien faut-il, en moyenne, à l’ouvrier pour vivre ? De quoi se compose sa subsistance ? Quel est l’inventaire de son ménage ? À quel taux des salaires devient-il misérable ? À quel chiffre peut-il passer pour aisé ? Dans quelle mesure la femme, et plus tard l’enfant, contribuent-ils à ce salaire ? Trop d’aisance le corrompt, trop de misère le tue. Comment tenir la balance ? De quelle part de contribution frapper l’ouvrier solvable ? Quel supplément, à titre onéreux ou gratuit, peuvent fournir au malheureux la commune, la corporation, la paroisse ? Il importe de connaître, avec exactitude, cette première partie du bilan de l’ouvrier.

« La constitution de l’être humain, pas plus que celle de l’animal, ne permet d’en exiger à toutes les époques de sa vie une somme égale de travail. À quel âge, d’abord, l’individu, mâle ou femelle, peut-il être jugé propre au service ? Combien ensuite, suivant l’âge, le sexe, la profession, l’individu voué au salariat peut-il fournir d’heures de travail par jour ? Combien par mois et par année ? Combien pour une carrière de dix, vingt, trente et cinquante ans ? Quelle est l’époque de la plus grande valeur de l’ouvrier ? Quand devient-il incapable de labeur ? L’homme étant considéré comme instrument de travail, quelle est la manière la plus avantageuse d’utiliser cet instrument ? Vaut-il mieux, au point de vue du produit et de la sécurité publique, aggraver la corvée de chaque jour et diminuer le salaire, au risque d’abréger la vie du sujet ? ou bien est-il préférable d’alléger le fardeau, afin