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damnation de l’athée ; j’attends tout de la vertu de son sacrifice, et j’adore en elle la conscience du genre humain. Ce cordon, cette médaille, brimborions ridicules, mais chargés des effluves d’une âme dolente et passionnée, devenaient pour moi un talisman qui devait me garantir de l’excès de ma colère vis-à-vis de l’homme, et de l’ironie à l’égard de la femme. Certes le miracle attendu par ma pieuse donatrice ne s’est pas accompli ; elle saura du moins, si elle lit ces lignes, que je n’ai pas failli à son vœu, et que je pourrai me vanter, au tribunal du grand Juge, d’avoir eu dans ma vie un quart d’heure de bonne volonté.

XII

Je ne voudrais pas qu’on m’accusât de plaisanter sur un sujet qui prête tant au ridicule : le libertinage en matière de religion est usé depuis Voltaire. Mais qui ne voit que le christianisme, dernier terme du paganisme, du théisme, est là tout entier ? Sans la foi aux sacrements, aux reliques, aux images, il n’y a point de religion. Et comme il n’y a pas de limites dans l’absolu, pas de distinction entre le monde de la nature et le monde de la grâce, la même pensée qui a fait imaginer cette thérapeutique de l’âme a suggéré, pour la satisfaction des intérêts matériels, une foule de pratiques également autorisées, sinon commandées par l’Église : en sorte que nous pouvons juger par le caractère de celles-ci de la valeur de celles-là.

Celui qui a pouvoir de nous sauver du péché, se sont dit les dévots, peut nous préserver aussi de toutes maladies et accidents. Ce principe posé, le recours à la Divinité n’a plus de bornes. Il y a donc des formules contre l’influence du mauvais esprit, pour toutes les circonstances de la vie : naissance, puberté, fiançailles, mariage, grossesse, accouchement, relevailles, sevrage, maladies, mort ; — pour toutes les actions : lever, coucher, travail, repos, visites,