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tion permanente avec lui-même, crée l’histoire et la destinée ?

En vertu de sa spontanéité antagonique et dominatrice, l’homme tend d’abord à se soumettre l’homme aussi bien que les choses. Il se crée en conséquence un système d’économie féodale, qui lui semble la forme naturelle de la société, et qui, expression de la liberté pour quelques-uns, devient bientôt une servitude intolérable pour la masse. — Puis, au nom de la liberté, il nie cet organisme ; il le combat, l’efface, et travaille à lui substituer un régime de Justice et d’égalité où il ne reste rien de servile et de fatal.

Système féodal ou de hiérarchie, monument d’une liberté oppressive ; contrat social ou commutatif, monument d’une liberté égalitaire : que l’on compare ces deux produits, et je me trompe fort, ou l’on reconnaîtra que toute leur différence consiste, ici dans la restriction, là dans la généralisation de la liberté.

Pour donner un contre-fort à son système de subordination des personnes et des fortunes, le libre arbitre crée un nouvel organisme, l’organisme politique ou le régime d’État, susceptible d’une grande variété de formes, mais qui dans sa variété même n’en est pas moins, pour l’immense multitude, du fatalisme comme le précédent, de la tyrannie. — Puis il rejette tout cet échafaudage ; il se dit que la société n’a pas besoin de commandement ; qu’il lui suffit pour se conduire de la Justice, qui n’est autre que la liberté se saluant de personne à personne.

Systèmes politiques, systèmes économiques, tout cela est de la liberté, certes, puisque c’est de l’art, de la religion, de l’absolutisme. Mais de l’homme à l’homme, de l’être libre à l’être libre, la religion, l’art, l’absolu, sont inadmissibles, une offense à la dignité. La Justice pure, une équation mathématique, sans fioriture, voilà l’orga-