Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 2.djvu/79

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alors, malheur à Jérusalem !… L’autorité du prêtre sur les enfants du peuple est perdue, me disait un juge de paix de campagne ; la parole du père l’emporte, et la première communion, qui pour le plus grand nombre est la dernière, a pris la signification d’un divorce.

XXVII

Comme tant d’autres, je me suis maintes fois étonné de cette duplicité ecclésiastique, dont on a voulu, mais à tort, faire l’apanage de la Compagnie de Loyola. Il me répugnait de penser qu’un corps aussi considérable que le clergé catholique, dans ses relations avec les puissances de la société, qui sont la Philosophie, la Science, le Travail, aussi bien que l’État, ne reculât pas devant la trahison et le meurtre, là où il ne peut réussir par la captation et la ruse.

J’ai fini par me rendre compte de ce phénomène. Ce ne sont pas les individus qu’il faut accuser : c’est l’Église.

Dans l’individu, prêtre ou laïc, la conscience naturelle vient sans cesse redresser les aberrations de la conscience transcendantale ; et, hors les cas rares d’une perversion absolue, on peut dire que l’homme est toujours meilleur que le croyant.

Mais les collectivités ne se comportent pas comme les individus. Elles n’obéissent qu’à leur idée, à leur raison sociale, si je puis ainsi dire, sans se laisser distraire par aucun autre sentiment.

L’Église est une collectivité formée seulement par et pour la foi, en qui disparaissent les affections humaines, et où la conscience religieuse reste seule, parlant et ordonnant au nom de Dieu.

Or, qu’est-ce que Dieu, dans l’ordre de la conscience, suivant l’Église ?